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Boucher

François

Paris 1703 – 1770

Un homme et une femme conversant, accoudés à une balustrade

Avec inscription vente Falconet et numéroté 54 sur le montage.
Pierre noire et craie blanche sur papier brun.
240 x 275 mm (9 1/2 x 10 3/4 in.)

Provenance

Étienne-Maurice Falconet (1716-1791), Paris, 10 décembre 1866, lot 54 :
« Composition de plusieurs figures. Au crayon noir rehaussé de blanc » (30 francs)

Appuyés contre une balustrade, un homme et une femme dans la foule sont plongés dans une conversation énigmatique. Coiffée d’un turban, la figure féminine désigne à l’homme un petit objet d’une forme crochue qu’elle tient en main. Celuici semble donner son avis. Datant de la maturité de l’artiste, ce dessin peut être rapproché d’un petit groupe autrefois identifié par Alastair Laing, une demi-douzaine d’études, de même esprit et de même technique1, qui ne sont jamais clairement apparentées à des compositions peintes. Boucher y utilise l’estompe d’une façon peut-être un plus marquée qu’à son habitude. Dans l’une d’entre elles, autrefois dans la collection Lucien Guiraud puis à la galerie Cailleux2, apparaît un personnage masculin tout à fait semblable au nôtre. Ces groupements de figures rappellent les grandes compositions de marché, de lavandières et de caravanes, thèmes déjà explorés par l’artiste en Italie, auxquels il revient dans les années 17603. Notre dessin pourrait-il être une étude fragmentaire, non utilisée ?

Alastair Laing a suggéré que certaines de ces études pourraient avoir été réalisées par Boucher pour servir de modèle à ses élèves. Ainsi, Jean-Baptiste Deshays utilisait parfois les dessins de son maître pour l’élaboration de cartons de tapisserie. Il ne les reprenait pas littéralement mais s’en inspirait pour trouver ses propres formules4. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer, comme Alastair Laing à propos d’une Étude de Borée, la réciprocité des influences entre l’élève et le maître, qui adopte à plusieurs reprises vers la fin de sa carrière « un style staccato très proche de celui de son gendre décédé5 ». C’est notamment le cas dans notre dessin, où les visages du fond sont traités de cette manière schématique et carrée caractéristique de Deshays.

Loué pour sa virtuosité, François Boucher, « né le pinceau à la main6 », fut longtemps considéré comme le « peintre des Grâces ». La facilité et la séduction qui lui furent souvent reprochées de son vivant n’occultent pas l’impeccable maîtrise technique et graphique ainsi que la grande culture visuelle du peintre, qui lui ont permis d’imposer son style pendant la majeure partie du siècle. Dessinateur assidu, il fut aussi professeur de dessin à l’Académie royale de peinture et de sculpture dès 1737 et semble avoir rempli sa tâche avec soin. De techniques et de sujets variés, ses nombreux dessins sont toujours d’une grande qualité ; souvent copiés, utilisés par ses élèves et abondamment gravés, ils ont été l’un des principaux vecteurs de son influence.

Cette œuvre a été examinée par Alastair Laing qui en a confirmé l’authenticité.

  1. Voir Alastair Laing, Les Dessins de François Boucher, Paris, Éditions Scala, 2003, p. 147.

  2. Galerie Cailleux, Boucher, catalogue d’exposition, Paris, 1964, n° 87.

  3. Le Retour du marché (1769 ; n° 71.2, don des héritiers de Peter Parker) et Le Repos à la source (1765 ; n° 71.3, don des héritiers de Peter Parker) conservés au Museum of Fine Arts à Boston.

  4. Voir Alastair Laing 2003, op. cit., p. 144, à propos d’Une étude de jeune femme désolée s’appuyant sur une plinthe.

  5. Idem, p. 178.

  6. Jean-Pierre Mariette, Abecedario, Paris, J. B. Dumoulin, 1854, p. 166.