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Baciccio

Giovanni Battista Gaulli, called

Gênes 1639 — Rome 1709

Portrait du Pape Innocent XII
de profil vers la droite

Pierre noire, sanguine, craie blanche sur papier beige, circulaire.
208 mm (8 316 in.) diamètre.

Provenance

Christie’s Londres, 2 juillet 2019, lot 56, attribué à Carlo Maratta; Mark Brady, New York, rendu à Giovanni Battista Gaulli ; collection privée.

Né à Gênes, Gaulli se forme probablement dans les ateliers locaux et s’exerce au portrait en étudiant les œuvres de Titien, Velasquez et Pierre de Cortone mais surtout celles d’Anton van Dyck, un artiste représenté en nombre dans les collections des grandes familles patriciennes de la ville. À Rome en 1657, Gaulli rencontre rapidement Gian Lorenzo Bernini ; le peintre et le sculpteur nouent une relation d’amitié et d’affaire fructueuse grâce à laquelle Gaulli deviendra l’un des plus importants et prolifiques auteurs de décors religieux à Rome à l’exemple de ceux du Gesù (1684). Associant l’influence flamande acquise à Gênes à l’acuité psychologique du Bernin, il met au point une formule qui lui permettra de devenir également l’un des portraitistes les plus appréciés de la Cité Éternelle, notamment par les souverains pontifes, d’Alexandre VII à Clément XI.

Ses portraits dessinés qui demeurent sont plus rares1. Ceux des papes forment un petit groupe de spectaculaires effigies aux craies colorées : le Niedersächsisches Landesmuseum (Hanovre) possède un portrait de Clément IX2 tandis que la Royal Collection (Windsor) conserve des portraits d’Innocent XI (Fig. 1) et de Clément X3 (Fig. 2). Gaulli a représenté Alexandre VIII Ottoboni plusieurs fois, de face dans un portrait conservé à la Morgan Library4 et préparatoire à un tableau conservé dans une collection privée de Venise5 et de profil dans deux dessins : l’un au Museum Kunst Palast de Düsseldorf6, l’autre à la galerie Nathalie Motte Masselink en 2010. Notre feuille, dont le profil distingué peut être identifié comme étant celui d’Innocent XII Pignatelli (1615- 1700, nommé pape en 1691), a récemment été reconnu par le spécialiste de l’artiste Francesco Petrucci comme une œuvre de Giovanni Battista Gaulli et constitue donc un ajout précieux à ce corpus. Au moins cinq portraits d’Innocent XII peints par Gaulli sont mentionnés dans les documents d’archives ; ils sont malheureusement perdus7.

Son format rond et le profil prononcé laissent penser qu’il s’agit d’un projet préparatoire à un portrait en médaillon. Gaulli suit en cela l’exemple donné par Gian Lorenzo Bernini avec ses dessins de profil d’Alexandre VII, réalisés au début des années 1660.8 L’un d’entre eux, conservé au Museum der Bildenden Kunste de Leipzig, a certainement servi de modèle au médaillon de plâtre autrefois conservé à Ariccia au Palazzo Chigi (localisation inconnue)9. Bernini s’inspire en cela des modèles de la Renaissance et Baciccio suit ici son exemple dans l’élaboration d’un type de représentation de profil qui peut aussi avoir servi, après réduction du dessin, aux médailles en or ou en bronze annuelles du Vatican10 ou à un portrait sculpté de plus grande taille à l’exemple de celui d’Innocent XI exécuté par Paolo Morelli (1657 – 1719) et conservé à la David collection de Copenhague.

Dans ce portrait, les chairs sont traitées avec une véracité qui rappelle l’influence flamande. Malgré le choix conventionnel de la représentation de profil, Gaulli sait restituer la psychologie du modèle avec une grande finesse. Le léger sourire et la force du regard expriment sa bienveillance et son intelligence, deux qualités qui forgèrent l’honnêteté de ce pape. Tout au long de son règne, Innocent XII, célèbre pour avoir déclaré « mes neveux, ce sont les pauvres », refusa l’obtention de toute charge ou privilège aux membres de sa famille et lutta contre la simonie.

  1. F. Petrucci, Baciccio Giovanni Battista Gaulli 1639-1709, Rome, 2009, pp.138-40.
  2. Ibid, p. 139, fig. 168, illustré. M. Trudzinski, Die italienischen und französischen Handzeichnungen im Kupferstichkabinett in der Landesgalerie, Hannover, 1987, cat. no. 33 (as Alexander VII).
  3. Royal Collection Trust : Inv. 905531, sanguine et pierre noire, lavis de sanguine, rehauts de blanc, 373 x 246 mm et Inv. 905533, sanguine et pierre noire, 198 x 146 mm.
  4. Inv. IV, 175, sanguine et pierre noire sur papier brun, 371 x 244 mm.
  5. H. Brauer, R. Wittkower, Die Zeichnungen des Gianlorenzo Bernini, Berlin, 1931, p. 157.
  6. F. Petrucci, op.cit., p. 138-140, fig. 170, illustré.
  7. Idem, 171 et p. 638-639, n°E13-E17.
  8. F. Petrucci, “Considerazioni sui ritratti berniniani di Alessandro VII”, dans A Tale for two Cities Rome and Siena in the Early Modern Period (1550-1750), Rome, 2017, p. 209, n° 8.
  9. Idem, 211, n°10 et 11.
  10. Voir par exemple celle du Metropolitan Museum réalisée en 1691 par le Romain Giovanni Martino Hamerani (1646-1705) avec au verso une allégorie de la charité : 2023.569.49, don du trust Mark and Lottie Salton Trust, 2021, ainsi que celle de 1696 avec la douane de Saint Pierre au verso (marché de l’art).