Franco

Battista

Venise 1510 — 1561

La chute de Phaeton ou les courses de chariot du cirque Maximus

Plume et encre brune sur papier, contrecollé.
151 x 299 mm (5 15/16 x 11 13/16 in.)

Malgré ses origines vénitiennes, Battista Franco est formé à Rome où il fréquente le cercle des suiveurs de Michel-Ange et prend part aux préparatif des décors éphémères pour l’entrée triomphale de Charles Quint à Rome et Florence et pour le mariage d’Éléonore de Tolède et Cosme Ier de Médicis à Florence en 1539. Après un bref retour à Rome au début des années 1540, il passe en 1545 au service de Guidobaldi II della Rovere, duc d’Urbino et célèbre commanditaire de la Vénus d’Urbin de Titien. Ces années de service, durant lesquelles il est le maître du jeune Federico Barocci, n’empêchent pas Franco de retourner occasionnellement à Rome, en 1548 et 1550 pour différents travaux, par exemple la décoration de la façade du palais du cardinal Federico Cesi et la chapelle Gabrielli à Santa Maria sopra Minerva. Vers 1552, il retrouve sa ville natale où il a laissé un Baptême du Christ à San Francesco della Vigna et les décorations du plafond dans la salle d’été au Fondaco dei Tedeschi et Bibliothèque Marciana. Il travaille aussi au Palais des Doges et à la chapelle Grimani de San Francesco della Vigna, terminée par Federico Zuccaro après sa mort.

Dessinateur prolifique, Franco fut collectionné avec assiduité au XVIIIe et XIXe siècles. Giorgio Vasari note ses nombreuses copies d’après l’Antique, « non seulement les statues mais toutes les antiquités de la ville » dont il possédait un certain nombre, assemblées dans un album. L’intérêt de Franco pour les vestiges antiques perdura toute sa vie, ce qui nuit à la datation précise des feuilles, qui doit donc s’effectuer à partir de critères stylistiques plutôt que chronologiques. Le sarcophage qu’il copie ici, un marbre grec restauré en plusieurs endroits, est aujourd’hui au musée des Offices de Florence (Fig. 1 ; Inv. 181). Mais c’est à Rome que Franco a pu voir ce sarcophage, où il était, au milieu du XVIe siècle, à droite de la porte principale de Santa Maria in Aracoeli. Il devint la propriété des Colonna au cours de la seconde moitié du XVIe siècle puisqu’il est signalé en 1600 par Onofrio Panvinio comme étant à Rome, dans le jardin de la famille Colonna (« in hortis familiae Columnensium cardinalis Borromei ad SS Apostolos »). Acquis par les Médicis sans que l’on sache quand ni comment il est mentionné par Anton Francesco Gori et localisé dans les jardins de la villa Pratolino, d’où il fut ensuite transporté dans la Galerie des Offices, d’abord dans l’entrée de la galerie (Lanzi) puis dans le second corridor où il est encore aujourd’hui.

La suite de la composition sculptée sur le sarcophage, du bord gauche jusqu’à la scène de Phaéton qui chute, est représentée sur un dessin conservé à la Fondation Custodia autrefois donné à Franco, puis à Giulio Romano, mais aujourd’hui catalogué comme étant une œuvre de Girolamo da Carpi. Malgré la provenance prestigieuse de cette feuille (Nicholas Lanier, Jonathan Richardson senior, Horace Walpole, Henri Fuseli), sa graphie est bien plus faible que celle de Franco, très identifiable par sa « ligne acérée et efficace et sa combinaison des formes michelangelesques et raphaélesques » comme l’écrit A. E Popham. Carpi et Franco ont partagé le même intérêt pour l’antique et leur graphie est assez proche, ainsi que le souligne Mariette1, surtout quand ils copient des reliefs, les contours marqués par un trait de plume et les fonds remplis de hachures. Ici, le style est particulièrement comparable à celui de deux feuilles du Louvre, parmi d’autres2 : Copie d’un relief de sarcophage antique avec Marsyas défiant Apollon (Inv. 4938) et Un soldat romain faisant preuve de clémence envers une famille barbare (Inv. 5010), tous deux datés par Anne Varick Lauder des années 1550-1552. Anne Varick Lauder, que nous remercions pour son aide, a confirmé l’attribution et la datation de ce dessin sur la base de la photographie et l’inclura dans son catalogue raisonné des œuvres de l’artiste.

  1. Abecedario, tome 1, p. 307.
  2. Par exemple : 4967, Inv. 4955, Inv. 4938, Inv. 4943.