Baglione
Giovanni
Rome 1566 — 1643
Étude pour la figure de la Vierge
Pierre noire, rehauts de craie blanche.
301 x 144 mm (11 13⁄16 x 5 11⁄16 in.)
Eric Schleier, Berlin.
Peintre et historien de l’art, premier biographe de son célèbre rival Le Caravage1, Giovanni Baglione se forme et travaille à Rome dans le style du maniérisme tardif jusqu’à ce que les innovations réalistes du Caravage, présent à Rome dans la dernière décennie du XVIe siècle, influent radicalement sur son œuvre. En quelques années Baglione élabore un style hétérogène, une « maniera propria2 », composé de réminiscences maniéristes, d’explorations réalistes, de références classiques et d’effets baroques. Gagnant les faveurs du clergé, il devient rapidement l’un des peintres les plus efficaces et productifs de la Contre-Réforme. Il est nommé chevalier de l’ordre du Christ par Paul V.
Plutôt rapidement tracée, cette étude d’une femme, la tête inclinée et les mains croisées sur la poitrine, est absolument caractéristique des études dessinées par l’artiste en préparation à ses figures peintes. Sur le plan du style graphique, elle s’apparente sans difficulté à de nombreuses feuilles de sa main, à la pierre noire ou à la sanguine, parfois mises au carreau. Ainsi l’Étude d’une Assomption de la Vierge3 conservée à la Pierpont Morgan Library de New York dans laquelle la Vierge croise les mains de la même façon que celle de notre dessin ou encore l’Étude d’un acolyte4 conservé au Cooper-Hewitt National Design Museum ; toutes deux, bien qu’à la sanguine, font preuve d’une conception similaire du volume et de la lumière.
Notre dessin prépare la figure de la Vierge dans un retable dévotionnel représentant la Sainte Famille avec Dieu le père conservé dans la chapelle San Giuseppe de l’église San Vincenzo de Gravedona en Lombardie. Mina Gregori5 a relié ce tableau à un groupe de trois dessins représentent la Sainte Famille marchant, au sortir du temple pour la feuille du Metropolitan et celle du Teylers et dans un environnement naturel pour celle de Bergame. Cependant, cette dernière feuille pourrait plutôt être reliée à un Retour d’Egypte de la Sainte Famille (Rome, S.S. Apostoli), qui met en scène Jésus et ses parents dans un paysage. Le tableau de Gravedona peut représenter l’un ou l’autre de ces sujets mais plus probablement le Retour du temple : Jésus, adolescent, semble se justifier – il avait disparu, occupé à parler avec les docteurs du temple, et ses parents se sont inquiétés (Luc 48-52). Le tableau est mentionné comme présent à Gravedona dès 16276 mais Mina Gregori le date plus tôt7, par comparaison avec trois œuvres peintes pour Santa Maria di Loreto à Spoleto en 1609. Les retables religieux de Baglione sont parfois un peu conventionnels, comme c’est le cas de celui-ci dont la dimension psychologique et narrative est moins développée que dans les dessins préparatoires. Son commanditaire est probablement Giovanni Antonio Curti dont la famille, bien que très présente à Rome, demeure attachée à cette chapelle tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles, comme en témoignent différents documents d’archives.
- Dans son ouvrage Le Vite de’ Pittori, Scultori, Architetti, ed Intagliatori dal Pontificato di Gregorio XII del 1572 Fino a’ tempi de Papa Urbano VIII. Nel 1642. (Vies des peintres, des sculpteurs, des architectes et des graveurs entre les papautés de Grégoire XII de 1572 à Urbain VIII en 1642).
- G. Mancini, Considerazioni sulla Pittura, 1617-1621, éd. A. Marucchi et E. Salerno, Rome, 1956, I, p. 246.
- Inv. 1965.2; sanguine, 324 x 232 mm.
- Inv. n° 1938.88.7054 ; sanguine, mise au carreau, 277 x 171 mm.
- Mina Gregori, Pittura in Alto Lario e in Valtellina dall’Alto Medioevo al Settecento, Milan, 1995, p. 269-270, reproduit p. 164, n° 100.
- Côme, Archives diocesaines, Visite pastorali, Lazzaro Carafino, XLn fasc. 4, cité par Mina Gregori, p. 269.
- Mina Gregori, Pittura in Alto Lario e in Valtellina dall’Alto Medioevo al Settecento, Milan, 1995, p. 269-270, reproduit p. 164, n° 100.